Avez-vous entendu parler des farines torréfiées ? Avez-vous déjà réfléchi à intégrer cet ingrédient dans vos produits ? Connaissez-vous les fonctionnalités de ces farines ?
Le Centre Culinaire Conseil a mandaté un groupe de 3 étudiantes de la Licence DRACI (Développement et Recherche en Art Culinaire Industrialisé) de l’Université de Rennes 1 pour travailler sur ce sujet et aussi tester la mise en application de certaines farines torréfiées dans différentes matrices alimentaires.
LA TORREFACTION, C’EST QUOI ?
Souvent associées aux denrées telles que le café, le cacao ou encore les amandes, la torréfaction et le toastage sont deux procédés assez similaires qui consistent à griller un produit pendant un temps plus ou moins long (de quelques minutes à quelques dizaines de minutes) dans le but d’augmenter sa durée de conservation, de réduire ou éliminer les facteurs antinutritionnels naturels, d’améliorer le taux de protéines assimilables et leur digestibilité et de développer des qualités aromatiques et gustatives.
Les températures appliquées lors du toastage sont moins élevées que lors de la torréfaction. Pour réaliser des farines torréfiées, cette technique peut être appliquée soit sur la matière première brute (la plupart des céréales, graines, oléagineux, légumineuses…), soit directement sur les farines.
LES CHANGEMENTS LORS DE LA TORREFACTION (arôme /couleur /fonctionnalité…)
La torréfaction ou le toastage sont applicables pour une large gamme de farine et vont permettre le développement de nouvelles caractéristiques sensorielles et fonctionnelles.
Grâce à la maîtrise de la température et de la durée de torréfaction, il existe différents niveaux de torréfaction jouant aussi bien sur la couleur que sur l’intensité de la saveur des farines : une torréfaction plus légère permet le développement d’arômes plus sucrés et délicats, parfois avec une légère acidité avec des couleurs blondes et caramélisées tandis qu’une torréfaction plus poussée apporte des arômes plus corsés et amers et des teintes foncées.
De plus, la torréfaction provoque des changements structurels de la matière première avec l’apparition de nouvelles fonctionnalités. Avec la maîtrise du processus de torréfaction, les fabricants arrivent à préserver (voir améliorer) les valeurs nutritionnelles des farines.
Par exemple, pour les farines contenant du gluten, le taux de protéines reste inchangé mais ces dernières sont dénaturées, ce qui impacte la consolidation du réseau gluténique d’où l’utilisation de la torréfaction douce par certains industriels.
En revanche, pour les farines sans gluten, la torréfaction permet de favoriser la gélatinisation de l’amidon afin de le rendre plus digeste mais aussi d’améliorer ses propriétés liantes.
PANORAMA DES FARINES TORREFIEES PRESENTES SUR LE MARCHE
Il existe une grande variété de farines torréfiées sur le marché. Qu’elles soient issues de céréales, de graines, de légumineuses ou de fruits à coque, elles sont très riches sur le plan aromatique et peuvent être utilisées en tant qu’ingrédient fonctionnel précis.
Voici une liste non exhaustive de farines présentes sur le marché
LES FARINES MALTEES TORREFIEES
Pour la fabrication de ces farines, les céréales (orge, seigle, blé…) subissent un processus de germination appelé « maltage » avant d’être torréfiées puis transformées en fine mouture. Ces farines sont dépourvues d’activité enzymatique (malt non diastasique) et n’exercent aucune influence sur la fermentation lors de la panification. La torréfaction du malt est utilisée pour améliorer les propriétés organoleptiques et colorantes des produits finis.
DES SOLUTIONS CLEAN LABEL POUR DES USAGES CULINAIRES VARIES
Au travers un exploratoire culinaire, les étudiants ont travaillé sur la mise en application de ces farines dans différentes matrices alimentaires. Les farines ont été incorporées soit en substitution d’une partie de la farine initiale, soit en ajout en tant qu’ingrédient fonctionnel. Après échange avec différents fabricants ou fournisseurs, sept farines ont été sélectionnées pour cette étude. Voici les farines testées en laboratoire culinaire :
- Farine seigle malté torréfiée – Good Mills Innovation (revendeur société Adinal)
- Farine orge malté torréfiée – Good Mills Innovation (revendeur société Adinal)
- Farine blé malté torréfié – Moulins Bourgeois
- Farine blé malté toasté – Moulins Bourgeois
- Farine de lupin toasté – Markal
- Farine de maïs torréfiée – Moulin Taron
- Farine de maïs torréfiée – Moulin des Moines
Les possibilités d’applications peuvent être multiples, mais le premier grand secteur que les étudiants ont identifié est celui de la BVP. La farine torréfiée est souvent utilisée pour la panification avec un taux d’incorporation compris entre 20 et 30%. En pâtisserie et biscuiterie, elle sert également d’exhausteur de goût et de colorant naturel et peut permettre de réduire le taux de sucre de certaines préparations.
A plus faible dosage, pour leurs propriétés aromatiques principalement mais aussi pour des apports nutritionnels ou fonctionnels (texturant, épaississant…), les farines torréfiées peuvent être utilisées dans d’autres domaines alimentaires tels que les substituts de viande, les soupes et sauces, les boissons végétales, les pâtes ou la transformation de viande.
CONCLUSION
L’incorporation des farines torréfiées dans diverses matrices est une véritable opportunité pour développer des innovations alimentaires différenciantes en apportant un plus sensoriel. Afin de mettre en avant tout leur potentiel, il est essentiel de connaître les spécificités de la torréfaction en vue de choisir le meilleur compromis entre saveurs et fonctionnalités.
Pour les industriels souhaitant s’inscrire dans une démarche Clean Label, l’emploi des farines torréfiées en tant qu’ingrédient peut également répondre à la demande de « naturalité » des consommateurs.
Léna SCOAZEC, Tonya CHOLOUX & Benjamin DEGOULET – Licence professionnelle DRACI 2022 / Encadrement : Centre Culinaire Conseil – Marie-Loïc GARIN et Emilie ROBIN